- La conduite à tenir devant une asthénie est résumée dans l’organigramme présenté en fin de chapitre.
- Symptôme fréquent en cancérologie, souvent sous-estimé :
- 60 à 96% des patients suivis pour un cancer
- dont 50% au diagnostic.
- pouvant persister à l’arrêt des traitements.
Définition (NCNN)
Sensation subjective de fatigue anormale généralement chronique, sans cause immédiate (absence d’effort ou effort minime), non améliorée par le repos et cliniquement significative.
Etiologies en cancérologie
Multifactorielles et multidimensionnelles
Liées au cancer
- Progression de la maladie
- Syndrome para néoplasique
- Anémie
- hypercalcémie
- Cachexie, dénutrition
- Nausées, vomissements
- Douleur
- Troubles neuro-musculaires
- Effets secondaires des traitements
Causes médicamenteuses
- Opioïdes, hypnotiques, anxiolytiques, anti histaminiques, antiémétiques, antihyperten-seurs
Comorbidités
- Insuffisance cardiaque, rénale, hépatique, pulmonaire
- Désordres neurologiques, syndrome d’apnée du sommeil…
- Infection
- Déshydratation
Causes endocriniennes
- Hypothyroïdie (/!\Sutent)
- Diabète
- Hypogonadisme
- Insuffisance surrénalienne
Origine psychique
Stress, anxiété, dépression, insomnie
Evaluation : les échelles (Karnofsky et autres)
- Les échelles unidimensionnelles
- Les plus simples à utiliser.
- Verbale : fatigue absente, légère ou modérée, sévère
- Numérique (par analogie à l’EVA) : échelle de 0 à 10,
- 0 correspondant à l’absence de fatigue et 10 au maximum de fatigue imaginable
- Les échelles évaluant l’état général telle que celle de l’OMS ou le Karnovsky peuvent être utilisées
Karnofski | Etat général | OMS | Etat général |
100 | Normal, pas de plainte | 0 | Activité normale, sans restriction
|
90 | Activité normale. Symptômes mineurs de la maladie
| 1 | Restreint pour des activités physiques importantes mais patient ambulatoire et capable de fournir un travail léger
|
80 | Activité normale avec efforts.
| ||
70 | Capable de se prendre en charge, mais incapable d’avoir une activité normale ou de travailler
| 2 | Ambulatoire et capable de se prendre en charge, mais incapable de fournir un travail pendant plus 50% de son temps
|
60 | Nécessite occasionnellement de l’aide, mais capable de subvenir à la plupart de ses besoins
| ||
50 | Nécessite aide et soins médicaux fréquents
| 3 |
Capable d’une prise en charge plus limitée. Passe plus de 50% dans son lit ou couché |
40 | Nécessite soins médicaux et aide importante
| ||
30 | Sévèrement limité, grabataire. Indication d’hospitalisation, quoique la mort ne soit pas imminente.
| 4 | Patient grabataire. Incapable de se prendre en charge. Patient passant tout son temps au lit ou couché.
|
20 | Gravement atteint. Hospitalisation nécessaire. Traitement symptomatique nécessaire
|
Asthénie selon le type de traitement
- Lors de la chimiothérapie
- La fréquence de l’asthénie : 75-95% des patients
- Maximale durant les 4-5 jours suivants la chimiothérapie (maximum lors du nadir de globules blancs)
- Diminution ensuite au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la chimiothérapie jusqu’à la cure suivante
- Les molécules réputées asthéniantes ; le sunitinib (Sutent), l’interféron, l’IL2, le Cis platine, l’ifosfamide, la vincristine, la fludarabine, le docétaxel…
- Le cis platine, les taxanes et la vincristine sont responsables de désordres neuro-musculaires.
- Lors de la radiothérapie
- Présente chez 60-93% des patients.
- Accentuation de l’asthénie au fur et à mesure du traitement par radiothérapie, en fonction de la dose journalière reçue.
- Après traitement initial, persistance de l’asthénie chez 13 à 35% des patients.
Prise en charge
- Prévention (cf. organigramme CAT en cas d’anémie présenté en annexe en fin de chapitre)
- Essentielle, à toutes les phases de la maladie.
- Favoriser le maintien d’une activité aérobie dès le début de la maladie. , y compris pendant la chimiothérapie, les thérapies ciblées et la radiothérapie.
- Pratique du vélo d’appartement, la marche, le yoga, aquagym… (3 à 5 séances hebdomadaires de 20 à 30 min).
- Dans certains cas, possibilité d’exercer une activité professionnelle
- Autres prises en charge associées
- La prise en charge immédiate de la douleur
- Prévention de la dénutrition
- Prévention et traitement des troubles psychologiques
- Réaliser une enquête afin de pouvoir adapter au mieux la prise en charge thérapeutique et de proposer lorsque cela est possible un traitement étiologique. Le plus souvent cependant, cette enquête demeure négative (encadré 3)
- Types d’asthénie
- Asthénie physique prédominant le soir
- Asthénie psychologique prédominant le matin, souvent associée à des signes psycho-pathologiques.
- Traitement de l’asthénie
- Correction d’un facteur étiologique lorsque cela est possible,
- Information et une éducation du patient,
- Traitement symptomatique non pharmacologique
- Et parfois un traitement pharmacologique.
- Mesures non pharmacologiques
- Les techniques de « conservation d’énergie »,
- Approche psychologique
- Activité physique adaptée.
- L’intervention des psychologues est essentielle pour éliminer une dépression, permettre au patient de continuer à verbaliser sa fatigue et éviter le repli sur soi.
- Plus que les techniques de conservation d’énergie, les méthodes de réhabilitation et d’entraînement physique sont recommandées ; mais leur place et son efficacité sont très variables selon le stade de la maladie et son traitement.
- D’autres mesures comme les techniques de relaxation diverses, le yoga, la kinésithérapie peuvent être proposées
- Pas de preuve d’efficacité et/ou pas de recommandations pour :
- Les supports vitaminiques ou hyper protéinés
- Les corticoïdes et l’acétate de progestérone
- Les psychostimulants (méthylphénidate ou RITALINE® et dexamphetamine) ou le modafénil ont été évalués avec des résultats variables qui nécessiteraient un contrôle par une étude randomisée de plus grande taille.
- A réévaluer :
- Ginseng nord-américain : abstract à l’ASCO 2008 avec t amélioration possible de la fatigue des patients traités (dose de 1000 à 2000mg/j).
- Guarana (50 mg 2 fois/jour) : ASCO 2010 diminution de la fatigue versus placébo chez les patientes sous chimiothérapie pour un cancer du sein.
Il n’existe actuellement pas de traitement symptomatique pharmacologique qui puisse être recommandé (hormis les Epo en cas d’anémie).
Techniques d’économie d’énergie
| Activité physique adaptée
|
Références bibliographiques
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Caroll JK et al, The Oncologist 2007; 12(suppl 1):43–51)
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Minton et al, J Natl Cancer Inst 2008; 100: 1155 – 1166)
National Comprehensive Cancer Network (NCCN). Cancer-related fatigue (2010). http://www.nccn.org/professionals/physician_gls/f_guidelines.asp (septembre 2010))
Reférentiels inter-régionaux en soins oncologiques de support, AFSOS décembre 2010)
Ryan J et al, The Oncologist 2007; 12 (Suppl 1): 22-34)
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Younus J et al, A double blind placebo controlled pilot study to evaluate the effect of ginseng on fatigue and quality of life in adult chemo-naïve cancer patients, Proc Am Soc Clin Oncol 22: 2003 (abstr 2947))